mercredi 15 avril 2015

La danse de la pluie / El baile de la lluvia

Je'elo' tu yáak'abil túune' ka jbino'on te' tu chúumukil le k'íiwilo' ka tin wilaj u beet'al jump'éel óok'otil balts'am jach ki'ichkelem tin wilajil, u k'aabae': u yóok'otil cháak.
Donc ce soir-là quand nous sommes allés au parc, j'ai vu qu'on représentait une oeuvre théâtrale dansée qui me plut beaucoup. Son nom était la Danse de la pluie.


Jo'otúul wíinik nu'ukbesik, kantúule' chak xiib, k'an xiib, sak xiib yéetel box xiib, leti'obe' ku yantalo'ob no'oja'an tu'ux yaan lak'in, chik'in, noojol yéetel xaman,
Cinq hommes la dansaient. Quatre d'entre eux étaient l'homme rouge, l'homme jaune, l'homme blanc et l'homme noir. Ils étaient placés à l'Est, à l'Ouest, au Sud et au Nord.

ken chúunsa'ak yáax jumpuul u ja'ats'al le tunk'uulo' ku jóok'olo'ob tu'ux ya'ano'obe' ku bino'ob chúumuk tu'ux yaan Yaxal Cháak,
Au premier coup du tunkul ils quittent leur position et vont au centre où est le Premier Cháak.

leti'e' kulukbal yóok'ol juntúul kaan beeta'an yéetel jejeláas nu'ukulilo'ob utia'al u chíikpajal jach bey juntúul nojoch kaane',
Celui-ci est assis sur un serpent composé de différents matériaux pour ressembler exactement à un grand serpent.

le máax beetik u wíinikil je'ela' ku pixik u yich yéetel jump'éel pix ich chika'an bey juntúul áayime'.
Celui qui personnifie le Premier Cháak a le visage couvert d'un masque en forme de caïman.

Le kantúulo'ob tin yáax a'alajo' u ch'uykíimaj chúujo'ob tu wíinkilalo'ob u machmajo'ob junjunxóot'al máaskab ku ja'aja'ats'iko'ob tu baatubaob,
Les quatre hommes que j'ai mentionnés en premier portent des gourdes d'eau, et tiennent en main chacun une machette avec laquelle ils combattent entre eux,

ku ts'o'okole' ku bin u wekiko'ob le ja' u k'almaj tu chúujo'obo', yaan súutuke' ku ch'ulik u k'abo'obe' ku ti'iti'its'iko'ob ti' máak.
puis ils versent peu à peu l'eau de leurs gourdes, et de temps en temps ils se mouillent les mains pour éclabousser les gens.

La jeune héroïne de Danzas de la noche est partie retrouver son père, le maître de ballet de la ville voisine. Sur la place centrale, le parc sert de salle de spectacle, et le soir de son arrivée, la fillette assiste à une fête qui la marque beaucoup. On représente deux comédies-ballets et la première est la Danse de la pluie.

Dans cette danse dont je vous ai donné le texte maya sont incluses les croyances mayas les plus caractéristiques. Quatre hommes occupent les directions cardinales, et la couleur de chacun des costumes est en relation avec le point cardinal correspondant, rouge pour l'Orient, noir pour l'Occident, jaune pour le Sud, blanc pour le Nord, comme on le voit dans les cérémonies sacrées actuelles, et comme on le trouvait chez les Mayas classiques, dans les codex, ou à l'époque de la Conquête dans les Livres de Chilam Balam ou chez Diego de Landa.

Le centre est essentiel dans la pièce: bien sûr, au théâtre, le centre de la scène est le point névralgique de toute représentation; mais, dans la cosmovision maya, c'est aussi l'axe du monde figuré par la Ceiba (ya'axche'), le kapokier. Ici, le centre est occupé par Cháak, le dieu de la pluie, dont le nez en forme de trompe est figuré par un masque de caïman, animal en relation avec le masque de Cháak  (photo infra), qui orne tant de monuments.

Cháak sur une / sobre una Ceiba
(Dresden codex)

Le dieu est ici assis sur la représentation d'un serpent. Or le serpent est fondamental chez les Mayas. Son nom (kaan) est homophone de "quatre" (kan), comme les quatre points cardinaux, et du "ciel" (ka'an): le serpent est donc à lui seul l'incarnation de l'univers. En outre, le serpent à sonnettes spécifique des régions mayas pourrait bien, avec les motifs géométriques de son dos, être à l'origine du système calendaire de mésoamérique qui repose sur les nombres 13, 20, 52, selon l'hypothèse fascinante de José Díaz Bolio (voyez le dessin du motif dans cet article d'El Chilam Balam, "Le carré magique des mayas"). Enfin l'image du serpent, serpent à sonnettes ou serpent à plumes (Kukulcán) orne les monuments de façon impressionnante, par exemple à Uxmal et à Chichen Itzá (photo infra).

Le ballet commence au son du tunkul, qui est un grand tambour en bois. C'est un tambour à fente creusé dans un tronc d'arbre, posé horizontalement; on en joue en le frappant de deux baguettes à l'extrémité renforcée de caoutchouc. C'est un tambour cérémoniel et le tambour de guerre, et de fait il s'agit ici d'une danse guerrière. Les évolutions miment un combat entre les points cardinaux. Ce sont les éléments qui se déchaînent, les vents en lutte et le tonnerre qui gronde. Et vient la pluie: les quatre danseurs distribuent l'eau, en arrosant le sol et les spectateurs. Ils sont donc aussi quatre incarnations de Cháak comme on les trouve déjà dans les codex, avec le nom exact repris dans notre texte, chac xiib Cháak, "rouge mâle Cháak", k'an xiib Cháak, "jaune mâle Cháak", etc.

Tunkul à/en la radio Xenka, Felipe Carrillo Puerto
(Archives El Chilam Balam)

Ce ballet est une création imaginée par l'auteur du roman, Isaac Carrillo Can. Mais, dans sa concision, le texte est très évocateur. La cosmovision maya y est essentielle, la musique traditionnelle (maaya páax) est là. Et la fête suggère les danses préhispaniques, mais elle évoque surtout à la fois des danses rituelles existantes, par exemple au Guatemala, et une cérémonie sacrée bien spécifique, qui a toujours cours au Yucatán, le Ch'a'a' Cháak, rite pour faire venir la pluie. Dans cette cérémonie, le jmeen, le prêtre maya, invoque les "Vents des quatre côtés du ciel", quatre enfants au pied de l'autel chantent comme des grenouilles, des libations de balché sont faites aux quatre points cardinaux, et quatre Cháak viennent au galop grondant de leur cheval pour boire le balché et apporter la pluie (photo infra).

La deuxième danse de cette soirée est complémentaire, puisque c'est la Danse du feu, donc de l'éveil de la lumière et de la pensée, et sa présentation est plus symbolique. C'est un plaisir pour moi de voir ainsi comment un auteur maya actuel enrichit sa création littéraire de la thématique la plus ancrée dans la tradition maya pour écrire une oeuvre d'imagination qui nourrit le rêve.

xxx

Je'elo' tu yáak'abil túune' ka jbino'on te' tu chúumukil le k'íiwilo' ka tin wilaj u beet'al jump'éel óok'otil balts'am jach ki'ichkelem tin wilajil, u k'aabae': u yóok'otil cháak.
Entonces en la noche cuando fuimos al parque vi que se represente una obra teatral bailada, que me gustó mucho. Su nombre era el Baile de la lluvia.

Jo'otúul wíinik nu'ukbesik, kantúule' chak xiib, k'an xiib, sak xiib yéetel box xiib, leti'obe' ku yantalo'ob no'oja'an tu'ux yaan lak'in, chik'in, noojol yéetel xaman, 
Cinco hombres la realizaban, cuatro eran varón rojo, varón amarillo, varón blanco y varón negro, ellos estaban colocados en el oriente, en el poniente, en el sur y en el norte,

ken chúunsa'ak yáax jumpuul u ja'ats'al le tunk'uulo' ku jóok'olo'ob tu'ux ya'ano'obe' ku bino'ob chúumuk tu'ux yaan Yaxal Cháak, 
y en el primer golpe del tunkul salen de donde están y se van al centro en donde está el Primer Cháak,

leti'e' kulukbal yóok'ol juntúul kaan beeta'an yéetel jejeláas nu'ukulilo'ob utia'al u chíikpajal jach bey juntúul nojoch kaane',
quien está sentado sobre una serpiente hecha de diferentes materiales para que se asemeje justo como una gran serpiente,

le máax beetik u wíinikil je'ela' ku pixik u yich yéetel jump'éel pix ich chika'an bey juntúul áayime'.
quien personifica al Yaxal Cháak se cubre del rostro de una máscara que se parece a un caimán. 

Le kantúulo'ob tin yáax a'alajo' u ch'uykíimaj chúujo'ob tu wíinkilalo'ob u machmajo'ob junjunxóot'al máaskab ku ja'aja'ats'iko'ob tu baatubaob,
Los primeros cuatro que he mencionado tienen colgados en sus cuerpos calabazos de agua, tienen en las manos sendos machetes con que combaten entre si,

ku ts'o'okole' ku bin u wekiko'ob le ja' u k'almaj tu chúujo'obo', yaan súutuke' ku ch'ulik u k'abo'obe' ku ti'iti'its'iko'ob ti' máak.
y después van derramando el agua que tienen en sus calabazos, a veces se mojaban las manos y salpicaban a la gente.

La heroína joven de Danzas de la noche se fue a buscar a su padre, el jefe de los bailadores de la ciudad que era vecina del pueblo de su infancia. En el parque de la plaza principal se dan los espectáculos, y cuando llega, la muchacha asiste en la noche a una fiesta que la impresionó mucho. Se representan dos obras teatrales bailadas, y la primera es el Baile de la lluvia.

En este baile cuya descripción en maya les di aquí se ven las creencias mayas más características. Cuatro hombres ocupan las cuatro direcciones del universo y el color de cada ropa corresponde a la del punto cardinal, rojo para el Oriente, negro para el Poniente, amarillo para el Sur y blanco para el Norte. Se ve así en las ceremonias mayas de hoy, y se encontraba así entre los mayas clásicos, en los códices, o a la Conquista en los Libros de el Chilam Balam o en Diego de Landa.

El centro es esencial en este baile. Claro, en un teatro, el centro de la escena es el punto neurálgico de todas las representaciones. Sin embargo, en la cosmovisión de los mayas, es también el eje del mundo, figurado generalmente por la Ceiba sagrada (ya'axche'). Aquí el centro está ocupado por Cháak, el dios de la lluvia, cuya nariz en forma de trompa esta representada por una máscara de caimán, animal relacionado con la máscara de Cháak que adorna tantos monumentos.

Máscara / masque de Cháak, Mayapan
(foto N. Genaille)

El dios está sentado en la figuración de una gran serpiente. La serpiente también es fundamental entre los mayas. Su nombre (kaan) es homófono de "cuatro" (kan) como los cuatro puntos cardinales, y del "cielo" (ka'an): la serpiente está así entonces la encarnación del universo. También la víbora de cascabel especifica del mundo maya podría bien, con los motivos geométricos de su cuerpo, ser el origen del calendario mesoamericano con los números 13, 20 y 52... Es la hipótesis fascinante de José Díaz Bolio (vean el dibujo en el articulo de El Chilam Balam "El cuadrado mágico de los mayas"). Y la imagen de la serpiente, víbora de cascabel o serpiente emplumada (Kukulcán) adorna los monumentos de manera impresionante, por ejemplo en Uxmal o en Chichen Itzá.

Museo de Dzibilchaltún
(foto N. Genaille)

El baile comienza al sonido del tunkul, un gran tambor de madera (foto supra). Es un tambor de hendidura, hecho en un tronco de árbol ahuecado. Se pone horizontalmente en el suelo, y se toca con pelotas de goma sobre dos mazos. Es un tambor ceremonial y de guerra, y de hecho se trata aquí de un baile de guerra. Los bailadores de los puntos cardinales miman una batalla entre si. Son los elementos en guerra, los vientos en lucha, y el trueno sonando. Y entonces viene la lluvia: los bailadores distribuyen el agua, mojando el suelo y los espectadores. Entonces son ellos también cuatro Cháak, como ya se ven el los códices, exacto con el mismo nombre que aquí,  chac xiib Cháak, "rojo varón Cháak", k'an xiib Cháak, "amarillo varón Cháak", etc.

Este baile es una creación imaginada por el autor de la novela, Isaac Carrillo Can. Sin embargo, aunque sea muy conciso, el texto es muy evocador. La cosmovisión maya es esencial, la música tradicional (maaya páax) está aquí. Y la fiesta sugiere las danzas prehispánicas, y evoca también bailes rituales de hoy, por ejemplo en Guatemala, y también la ceremonia sagrada muy especifica, que todavía se hace en Yucatán, el Ch'a'a' Cháak, para pedir la lluvia. En este rito el jmeen, el sacerdote maya, invoca a los "Vientos de las cuatro direcciones del cielo", cuatro niños debajo del altar cantan como sapos, y libaciones de balché están hechas a los puntos cardinales, para que cuatro Cháak vengan al galope ruidoso de sus caballos para beber el balché y traer la lluvia.

Un Cháak con la hacha del relámpago
Un Cháak avec la hache de l'éclair
(Dresden codex)

El segundo baile de la noche es complementario, pues es el Baile del fuego, y entonces el del despertar de la luz y del pensamiento: su presentación es más simbólica. Es un gusto para mi ver así cómo un autor maya contemporáneo enriquece su creación literaria por los temas más arraigados en la tradición de los mayas para escribir una obra de imaginación que alimenta el sueño.

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